GEORGES BRIVAL : LES YOLES ONT ÉTÉ MA VIE.

Georges-Brival

Créateur de la première agence de publicité spécialisée dans le tourisme dans les années 1960, Georges Brival est le père fondateur de la course des yoles rondes.

BIO EXPRESS

1949 Formation en France ; intégre l’armèe
1957 Directeur adjoint de la communication à l’UAT, ( Union Aèromaritime de Transport )
1960 Retour en Martinique, crée GB Publicitè
1965 Introduit la publicitè dans le Tour Cycliste de la Martinique
1966 Organise sur la Savane le 1er concours d’èlègance automobile
1966-1968 Organise des courses de yoles dans diffèrentes communes
1966 Ouvre le dancing La Bananeraie, avec l’orchestre Tropicana
1967 Dirige la dèlègation artistique à l’Exposition Universelle de Montreal
1968 Ouvre la 1ere discothéque de la Martinique
1972 Crèe la Sociètè des Yoles Rondes de la Martinique
1976 Crèe avec Bernardin LOISEAU la coopèrative de pêche de la Sociètè des Yoles Rondes, pour la pêche à la langouste
1977 Crèe les Grands Viviers de Cosmy à Trinitè
1978 Est responsable de la promotion des Floralies Internationales
1985 Participe aux côtès de Rudolphe GIBUS à la crèation du 1er Semi-Marathon de Martinique
1985 Crèe le Tour de Martinique des Yoles Rondes
1988 Les yoles rondes se produisent à Tobago
1998 Crèe les premiéres Floralies Caribèennes

Dès les premières courses qu’il avait lancées au milieu des années 1960, Georges Brival avait senti venir le vent du succès commercial. Alors, en homme de pub, il utilisa les voiles pour vendre des marques, alors que d’autres donnaient des noms symboliques. Mais sans plus tarder, son exemple a été suivi.

Photo collection personnelle Georges Brival.

Vous êtes un Foyalais adopté par les gens de la mer ?
Je suis Foyalais à 100% par mes parents qui ont toujours habité là et moi-même je n’ai jamais quitté Fort-de-France pour un autre endroit. Dans mon enfance, la ville était divisée entre les Békés qui résidaient à Didier et les bourgeois au centre-ville et à Clairière et les familles qui sortaient des campagnes pour s’installer dans la péri­phérie. Par la suite, j’ai adopté la mer comme activité économique, mais aussi un élément culturel qui rassemble toutes les composantes sociales, économiques ou épidermiques de notre pays.

Comment s’est déroulée votre scolarité ?
J’ai fait normalement mes classes primaires sans difficulté aucune, aidé en cela par mes parents dont mon père qui était officier mécanicien de la marine marchande. Mal­gré tout, je n’ai pas réussi le bac à leur grand dam. Ne sachant pas quoi faire de moi, ils ont trouvé la solution en m’envoyant dans une école afin de devenir officier radio dans la marine marchande. Sur place, je me suis vite rendu compte que j’étais allergique au morse. Alors, j’ai vu que l’armée m’offrait des possibilités d’évolution, je me suis engagé pour deux ans dans l’armée de l’air. Engagement que j’ai reconduit pour six ans. Au final, j’ai fini par démissionner.

L’armée vous a ouvert la voie professionnelle. Sinon qu’auriez-vous comme métier ?
Tout de suite après ma démission de l’armée, je suis entré comme secrétaire du directeur de la communication à la compagnie aérienne UAT (Union Aéromaritime de Transport) qui assurait la desserte des pays d’Afrique. Alors là, j’ai trouvé ma véritable vocation qui était un métier dans la publi­cité. Dès que j’y ai mis le pied, je ne l’ai point quitté. Il faut dire que la chance m’a très tôt souri, car le directeur étant absent pour une longue durée pour raison de santé, j’ai assuré son intérim. Arrive le salon aéronau­tique au Bourget, c’est ainsi qu’il m’a été demandé de mettre en place une idée pour représenter l’UAT. Me souvenant qu’il exis­tait une maquette reproduisant intégrale­ment l’intérieur d’un DC6, avion utilisé par la compagnie UAT, nous avons organisé des visites à destination du public pour qui c’était l’unique occasion d’être en situation de découvrir l’atmosphère d’un vol. Cette maquette avait servi auparavant au tournage du film Nathalie, agent secret dont Martine Carole était la vedette. Compte tenu de l’originalité de l’opération, le général de Gaulle, alors président de la Républi­que, accorda à l’UAT le deuxième prix. En plus d’une aug­mentation de mon salaire, il m’a été offert un billet en avion cou­chette avec ma famille à destination de la Martinique. C’était les retrouvailles avec mon pays 11 ans après mon départ.

La publicité présentait aux Martiniquais les potentialités de leur pays et aux visiteurs toute la richesse culturelle et humaine que nous pouvions partager avec eux.

Qu’avez-vous ressenti lors de ces retrouvailles ?
Les retrouvailles ont été fructueuses pour la bonne raison que j’ai trouvé l’opportunité de rester. L’occasion était toute trouvée car le secteur de la publicité était inoccupé.
C’était le désert total. Ainsi, je suis reparti en France pour présenter ma démission et revenir aussitôt en Martinique. Sans plus tarder, une fois que j’ai posé mes valises, j’ai créé GB Publicité, la première agence de communication destinée à la promotion de notre
destination.

Pourtant, le secteur touristique n’en était qu’à ses débuts ?
En fait, tout était en place pour susciter le développement du tourisme, notamment en matière culturelle. Et quand les premiers grands hôtels ont ouvert leurs portes, j’ai capté la vague touristique en réalisant le pre­mier dépliant. Ce qui ne m’empêchait pas de mettre de la publicité sur « les bombes » qui assuraient le transport urbain. Certes à l’époque, les usines fermaient et le chômage devenait important, mais les perspectives existaient pour un développement touristi­que attractif. Inutile de vous dire que tout ce qui sortait sur le tourisme était de mon tra­vail, par exemple Tourist Martinique, la première revue sur le sujet.
En résumé, ma vie est marquée par la colla­boration avec tous les présidents qui se sont succédé à la tête de l’Office du tourisme de la Martinique.

Concrètement, quelle idée vous faisiez-vous du tourisme ?
Pour moi, l’alliance entre la publicité et le tourisme était vitale. Car la publicité présen­tait aux Martiniquais les potentialités de leur pays et aux visiteurs toute la richesse culturelle et humaine que nous pouvions partager avec eux. Et puis il y avait les acteurs du tourisme à soutenir à un moment où il n’existait rien. Henry Joseph, le premier directeur de l’Office du tourisme, n’était entouré que de quatre personnes. En venant vers l’équipe, j’apportais toute l’expérience acquise durant des années au service de la communication de l’UAT. J’étais animé par le projet de créer le produit touristique martiniquais. C’était pour moi ma contribution au développement économique de mon pays.

L’introduction des radios dites périphériques dont RCI et Jumbo, qui émettaient à partir des pays voisins, auraient pu vous inspirer pour lancer de nouveaux segments de publicité ?
Je me suis passé des radios qui ont émergé à cette époque-là. Je ne me suis pas intéressé non plus à la vague des radios libres dans les années 1980. Je ne comptais que sur les acteurs du tourisme dont Henry Joseph, puis plus tard Jacques Guannel à la tête de l’Office départemental du tourisme. De ce fait, j’ai été en situation de monopole pendant des années, non pas par un coup de pouce que l’on me donnait, mais grâce à ma détermination à réussir la promotion de la Martinique.

Vous étiez aussi l’homme des nuits comme propriétaire de boîtes de nuit ?
Oui, car il en fallait. On l’oublie trop souvent : c’était le désert dans les années 1960-1970 pour ce qui concernait les grands espaces pour la musique et la danse. Alors, j’ai lancé La Bananeraie au Lamentin avec l’orchestre Tropicana et La Moïna à Fort-de-France avec l’immense Marius Cultier et son orchestre Wabap. Sans surprise, durant les nuits de carnaval, je réunissais environ 3 500 personnes dans les deux boîtes. C’est ainsi que Henry Joseph m’a sollicité pour assumer la fonction de directeur artistique de l’exposition universelle du Canada. C’était l’occasionn de faire la promotion de mon pays, d’autant plus que la délégation comprenait une équipe de l’école hôtelière où on retrouvait toute la chaîne de formation en cuisine.

Alors, c’est donc tout naturellement que vous êtes le père de l’organisation de la course des yoles rondes?
L’idée de la création d’une manifestation autour des embarcations en mer est partie autour d’un plat de blaff au Vauclin avec des copains. A table en face de la mer, je voyais deux embarcations effectuer une course. L’une s’appelait Vini Wè Sa du Vauclin, propriété M. Marie-Louise dit Totos, l’autre était La Florida du Robert qui appartenait à Fernand Bellemarre. On m’informe que les deux embarcations effectuaient une course arrêtée. Je découvrais alors une réalité qui m’était complètement inconnue, car j’ai appris ce jour-là les types d’embarcations destinées aux courses : les yoles, les gommiers et les canots à trois avirons. Mais moi, à la seconde où j’ai vu la voile de la yole, je me suis dit : « Georges ! Ça c’est un support publicitaire ».

Quel a été l’impact des manifestations auprès du public ?
Le public ne demandait qu’à découvrir et participer à des manifestations tournées vers la mer. Il fallait donc répondre à cette demande. Alors, j’ai organisé une première course à Sainte-Anne couronnée d’un succès inattendu. Une autre fois, Sainte-Luce a accueilli la manifestation et, à midi, la ville a été déclarée
« sinistrée » : il n’y avait plus une seule bouteille de Didier ou de rhum ! C’est à la suite de cette affluence sans précédent pour une course sur l’eau que François Emica, à l’époque directeur de FR3 (radio) s’est joint à moi pour créer la Société des yoles et gommiers de la Martinique en 1972. Je peux dire que les yoles ont été ma vie et c’est dans ce sens que j’estime avoir beaucoup fait pour mon pays.

Quelles sont les circonstances qui ont favorisé le lancement du tour des yoles rondes ?
C’était à l’occasion d’un déjeuner à mon domicile, en compagnie de Jacques Guannel, Charles Ebion et Louis Yang Ting que je leur faisais part d’un nouveau défi que je me lançais, à savoir la réalisation du tour de la Martinique avec les yoles rondes. A l’époque, j’étais président de la Société des yoles rondes et quand j’ai fait part de ce projet aux membres du comité, ils ont été contre à l’unanimité. Mais ce n’était pas un obstacle pour moi sachant que j’avais la possibilité de financer personnellement cette opération. D’abord en réalisant un programme des courses pour 1985 financé par la publicité. Ce qui m’a permis de verser aux 80 participants une prime de 1 000 francs à chacun.

En dehors de la motivation commerciale, qu’est-ce qui expliquait votre détermination ?
L’espace publicitaire et la volonté d’enrichir le patrimoine touristique de la Martinique ! Dès les premières années de la course, alors que c’était encore très timide, j’ai vendu des espaces à Miko, Valda, Unimag 1 et Unimag 2. J’en étais à ma 5ème yole quand quelqu’un a suivi mon exemple.

Que pensez-vous aujourd’hui des courses de yoles rondes ?
J’ai un sentiment d’écoeurement. Car je trouve inadmissible avec le chômage qui existe en Martinique qu’un jeune sans emploi ne puisse pas rêver de devenir
professionnel dans un sport que nous sommes seuls à pratiquer dans le monde. Je persiste à dire que les courses de yoles peuvent s’autofinancer par la publicité, quand on pense que certaines voiles peuvent avoir près de 200 000 euros de publicité. Il serait indispensable d’associer les sponsors à une réflexion sur le devenir des yoles rondes. D’autre part, j’aimerais savoir pour quelle raison la régie publicitaire de cette manifestation est confiée à une même agence depuis 30 ans.


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